Passeport vaccinal : l’opposition à Québec continue de dénoncer l’absence de débats

Les partis d’opposition continuent de faire pression sur François Legault et son gouvernement afin qu’une commission parlementaire leur permette de débattre de la mise en place du passeport vaccinal au Québec.

C’est le Parti conservateur du Québec qui a mené l’assaut jeudi, son chef dénonçant longuement l’imposition de cette mesure. En point de presse à l’Assemblée nationale, Éric Duhaime a affirmé que l’obligation de présenter son passeport vaccinal pour avoir accès à certains établissements est un geste antidémocratique et discriminatoire.

À compter du 1er septembre, seules les personnes doublement vaccinées pourront accéder à certains services non essentiels (bars, restaurants, gyms, notamment) en montrant leur code QR numérique prouvant qu’elles ont bien reçu les deux doses requises devant les protéger contre le virus de la COVID-19.

Flanqué de la députée Claire Samson, qui a quitté la Coalition avenir Québec pour le Parti conservateur, M. Duhaime a déclaré que le premier ministre a choisi d’imposer le passeport vaccinal sans jamais faire la démonstration de sa pertinence, sur le plan scientifique, et sans permettre aux parlementaires d’examiner les enjeux liés à ce moyen.

Reconnu pour sa défense des libertés individuelles, le chef conservateur en a conclu que le Québec s’apprête à adopter la mesure possiblement la plus liberticide de notre vivant depuis les mesures de guerre, et ça va se faire sans débat, sans vote, sans échange, sans dialogue entre Québécois, sans modification, sans amendement.

Dès la rentrée parlementaire de septembre, Mme Samson prévoit d’ailleurs déposer une pétition qui comporte actuellement plus de 133 000 noms de citoyens s’opposant au passeport vaccinal obligatoire.Claire Samson et Éric Duhaime tiennent des copies de la pétition à l'Assemblée nationale.

La députée Claire Samson déposera à l’Assemblée nationale une pétition, forte de 133 000 noms jusqu’à présent, s’opposant à l’imposition du passeport vaccinal au Québec.

Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy Roussel

QS et le PQ se dissocient du Parti conservateur

Le Parti conservateur joint ainsi sa voix à celles de Québec solidaire (QS) et du Parti québécois (PQ), qui réclament eux aussi que les élus puissent poser des questions aux experts et débattre en commission parlementaire du bien-fondé de cette mesure controversée.

Or, contrairement aux conservateurs, QS et le PQ ne sont pas nécessairement contre le principe du passeport. Ils tiennent plutôt à baliser son application.

Dans un communiqué rendu public jeudi, le porte-parole de QS Gabriel Nadeau-Dubois a jugé dangereux de voir le premier ministre faire de la démagogie avec les mesures sanitaires. Le député estime que M. Legault agit de la sorte parce qu’il a peur de la critique.

Il a tenu à rappeler qu’il réclamait depuis des mois que le gouvernement évite la précipitation et l’improvisation dans ce dossier, le passeport étant une mesure lourde de conséquences, qui doit être bien encadrée pour éviter les dérives et les dérapages discriminatoires.

Au Parti québécois, le député des Îles-de-la-Madeleine et porte-parole en matière de santé, Joël Arseneau, estime qu’un débat parlementaire est clairement nécessaire, car cette mesure aura de grandes répercussions sur la vie des Québécois. Il propose donc une loi-cadre votée par les parlementaires afin, précise-t-il, de revenir à une certaine normalité démocratique.

On a déjà adopté, même en temps de pandémie, des projets de loi importants en l’espace de quelques jours à peine, mais sans nécessairement censurer les gens ou les bâillonner, a-t-il rappelé en entrevue à l’émission Le 15-18 jeudi.

Selon lui, l’adhésion des Québécois ne pourrait que s’en porter mieux si l’opposition et certains experts avaient leur mot à dire dans l’application de cette mesure.

On est vraiment à des années-lumière de ce que Éric Duhaime et le Parti conservateur veulent proposer, a-t-il cependant expliqué. Je ne pense pas que le Parti conservateur soit dans l’adhésion, mais plutôt dans le clivage, et ça, on n’est pas là du tout.

Legault maintient le cap

En tournée au Saguenay–Lac-Saint-Jean, le premier ministre s’est contenté de répéter sa position de la veille, selon laquelle une commission parlementaire pourrait donner une tribune à des opposants au passeport sanitaire dont les arguments sont non fondés.

Je n’aurais pas envie d’avoir certaines personnes que je ne nommerai pas venir expliquer qu’il y a un complot et que ce n’est pas bon de se faire vacciner, et que dans le fond on met une puce dans le bras du monde pour suivre ce qu’ils font, a répondu François Legault en conférence de presse. Je ne pense pas qu’on a besoin de ça au Québec.

Moi, je sens qu’il y a un support dans la population, a-t-il assuré, affirmant que les personnes vaccinées devraient avoir le droit de prendre part à des activités et de recevoir certains services non essentiels.

Selon lui, les personnes vaccinées commencent à être impatientes à l’égard de celles qui ne le sont pas, parce qu’on ne veut pas reconfiner.

Et, semblant trahir sa propre impatience face aux sorties de l’opposition : Il y a une période de questions à l’Assemblée nationale, a-t-il répliqué, en guise de solution pour traiter du passeport vaccinal.

Le PLQ dénonce le manque de reddition de comptes

Le Parti libéral (PLQ) s’était montré plus que favorable à l’application d’un passeport vaccinal au Québec lorsque sa cheffe, Dominique Anglade, avait demandé au premier ministre de mettre la mesure en vigueur dès le début du mois d’août, devant les craintes liées au variant Delta.

Il n’en demeure pas moins que les troupes libérales souhaitent elles aussi avoir leur mot à dire sur les modalités qui entourent cette mesure.

En entrevue à Midi info, la députée libérale de Saint-Laurent, Marwah Rizqy, a semblé piquée au vif par l’attitude de François Legault. C’est comme si le premier ministre s’était complètement dédouané de devoir faire une reddition de comptes envers les élus, mais aussi le peuple québécois, a-t-elle dénoncé, suggérant que le gouvernement caquiste avait peut-être pris l’habitude de gouverner par décret.

Un débat peut se faire rapidement. On est tous disponibles, on est tous au Québec. On peut faire un débat de trois heures, un débat de six heures, une seule journée.Une citation de :Marwah Rizqy, députée libérale de Saint-Laurent

Elle a aussi mis en garde contre le langage utilisé par le premier ministre pour parler du risque de voir témoigner certains intervenants en commission parlementaire. C’est justement ça qui nourrit les complotistes lorsqu’ils affirment que le Québec n’est plus une démocratie, a-t-elle soutenu.

Ça fait longtemps que François Legault n’a pas fait de commission parlementaire, a-t-elle enfin souligné. C’est le gouvernement qui choisit pratiquement tous les invités. Et très souvent, il nous refuse ceux qu’on aimerait inviter.

Elle a, en somme, qualifié sa crainte de voir des complotistes témoigner d’argument farfelu.

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