Argentine: explosion des cas de Covid-19 dans un bidonville au coeur de Buenos Aires | JDQ

Buenos Aires | Un bidonville enraciné au coeur de Buenos Aires, où vivent entassées plus de 40 000 personnes, est devenu en quelques jours la zone du pays où les cas de nouveau coronavirus progressent le plus fortement.

Villa 31, enchevêtrement de constructions sommaires multicolores situé dans une des zones les plus chères de la capitale, est passé d’un cas fin avril à 511 personnes testées positives mardi. Une femme de 84 ans, mère du premier habitant contaminé, est décédée. 

Au milieu de cette crise sanitaire, une bonne partie du “barrio” (quartier), comme l’appellent ses habitants, a été privé d’eau durant huit jours. 

« On est foutus car on nous a coupé l’eau, (…) je suis employé de maison et je suis restée sans travail », se plaint Maria Chaile, 37 ans.

À l’image de Maria, des dizaines de personnes transitent dans les ruelles en terre de la Villa 31, comme si de rien n’était. 

Par endroits, les bâtiments dépassent la section aérienne de l’autoroute qui longe le Rio de la Plata. Toits en tôle, jungle de fils électriques le long des murs et constructions sauvages, ce quartier s’étend le long des voies ferrées, de la gare des trains de banlieue de Retiro au port de marchandises. 

Au fond, se dessine la ligne des gratte-ciels du quartier d’affaires de la capitale, reflet des contrastes et inégalités de ce pays englué dans une profonde crise économique. 

« Contamination incontrôlable »

Dans les petites habitations, cohabitent plusieurs générations d’une même famille. 

Luis Fernando Guispert, étudiant de 28 ans, est arrivé là quand il avait deux ans en provenance de Bolivie avec ses parents. 

« Le nombre de contamination s’est multiplié (…) la contamination peut être incontrôlable », craint-il.

Selon lui, beaucoup d’habitants du quartier, « une ville dans la ville », n’ont pas respecté les mesures de confinement obligatoire décrétées par le gouvernement d’Alberto Fernandez (centre gauche) à partir du 20 mars, car la plupart « vivent au jour le jour ». 

Ici, beaucoup travaillent dans l’économie informelle, qui représente plus de 25% du marché du travail en Argentine. 

« La consigne était de rester à la maison, mais si tu restes confiné, tu n’as rien à manger; alors, soit tu meurs du coronavirus, soit tu meurs de faim ». 

La crise argentine et son inflation galopante (53,8% en 2019) touche toutes les couches de la société, mais frappe davantage les plus pauvres, qui représentent 35% des 44 millions d’Argentins. 

Population en hausse

Ce bidonville, le plus ancien de Buenos Aires, a commencé à se développer dans les années 1940 à proximité de la zone portuaire, explique Valeria Snitcofsky, professeur d’histoire à l’université de Buenos Aires (UBA), spécialiste de ces quartiers informels.

« Au début, il a rassemblé quelques migrants italiens et de l’intérieur du pays, des chômeurs d’une Argentine rurale en crise, ensuite est arrivée la migration des pays voisins », ajoute-t-elle. 

Depuis la crise économique et politique de 2001 en Argentine, la pire de son histoire récente, la population de la Villa 31 n’a cessé d’augmenter. On y trouve des boutiques, des salons de coiffure et des restaurants. Tous ouverts. 

Selon le dernier recensement de 2016, 43 190 personnes vivent là, mais les gens du quartiers disent qu’il y a bien plus d’habitants. 

« Il y a un niveau de densité qui ressemble aux favelas de Rio de Janeiro », souligne Fabio Quetglas, spécialiste de l’aménagement du territoire et des villes de l’UBA.

Les autorités ont lancé des campagnes de tests dans les bidonvilles de l’agglomération de Buenos Aires. A Villa 31, plus de 50% des tests réalisés se sont révélés positifs.

« Les résultats sont inquiétants », a déclaré le président argentin Alberto Fernandez, en prolongeant les mesures de confinement jusqu’au 24 mai dans la capitale, zone la plus infectée par le Covid-19, avec 80% des 6 550 cas à travers le pays, dont 321 mortels. 

« On sort acheter quelque chose et on voit les ambulance aller et venir avec des malades. La contamination est terrible, tu vas faire des courses et tu penses que tu vas attraper le virus », raconte Shirley Ruth Aduviri, une couturière bolivienne de 32 ans.

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